ILS SONT ALLÉS SUR LA LUNE (1/6) - Près de vingt ans avant que Neil Armstrong n’y pose le pied, le dessinateur du célèbre reporter à la houppette envoya son héros en mission vers notre cher satellite. Un double récit visionnaire, encore aujourd’hui.
Bien avant que Neil Armstrong et Buzz Aldrin, les astronautes de la mission Apollo XI, ne se posent sur le sol lunaire, le 21 juillet 1969, des écrivains, des philosophes, des poètes avaient rêvé de cet exploit insensé. Parmi eux, Hergé, Jules Verne, Lucien de Samosate, H. G. Wells, Cyrano de Bergerac et Norman Mailer.
Un jeune homme avec une drôle de houppette, engoncé dans un scaphandre orange, se présente face à une porte extérieure qui tourne lentement sur ses gonds. L’instant est solennel. Il descend les échelons qui courent le long d’une fusée à damier rouge et blanc, puis pose pour la première fois le pied sur la Lune.
Sur la planche 25 d’On a marché sur la Lune, Hergé (1907-1983) a pris le temps de ralentir l’action. Une grande case s’offre aux yeux des lecteurs. On y distingue un ciel noir, scintillant d’étoiles. La surface lunaire apparaît désolée, spectrale, avec ces cratères spectaculaires et un majestueux vaisseau posé, silencieux… En plissant les yeux, on discerne un Tintin minuscule qui s’avance vers l’infini (et au-delà) en disant: «Ça y est!… J’ai fait quelques pas!… Pour la première fois sans doute dans l’histoire de l’humanité, ON A MARCHÉ SUR LA LUNE!»
De manière ô combien singulière, quelque vingt ans plus tard, les lecteurs de Tintin et Milou auront comme une impression de déjà-vu lorsque, le 21 juillet 1969, Neil Armstrong prononcera ces mots: «Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité!»
Encore aujourd’hui, la similitude est frappante. Avec le recul, ce qui retient l’attention, c’est qu’Hergé ait imaginé cette extraordinaire odyssée spatiale au quotidien, dans ses tout petits détails et sans la moindre grandiloquence.
Cette absence d’emphase romanesque est sans doute due à l’état d’esprit général de l’artiste, qui, après avoir été accusé d’incivisme (il a continué à publier les aventures de Tintin et Milou dans Le Soir volé sous l’occupation allemande), sort brisé de la Seconde Guerre mondiale. Son arrestation par la Sûreté de l’État, à l’automne 1944, continue de miner le dessinateur. Même le fait d’avoir été blanchi grâce à l’intervention du résistant Raymond Leblanc, avec qui il fonde le magazine Tintin en 1946, ne suffit pas à le remettre en selle
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