L'espoir d'une sortie de crise
Comment l’épidémie a-t-elle impacté les principes éthiques de notre société ? Au delà de la question morale, faut-il viser une vaccination de toute la planète pour diminuer ce risque des variants ? Quelles leçons la médecine peut-elle tirer ?
Ce week-end semble marquer un tournant dans l’épidémie : les confinements sont désormais territoriaux et la campagne de vaccination, considérée par l’exécutif comme seule issue de crise, s’accélère. Alors que la France privilégie la stratégie “stop and go”, d’autres pays n’ont qu’un seul objectif : zéro covid sur leur territoire. Ailleurs, dans les régions les plus pauvres du monde, la concrétisation des grands discours sur l’égal accès au vaccin se fait encore attendre.
Axel Kahn, médecin et généticien, président de la Ligue contre le Cancer, auteur de “Et le bien dans tout ça ?”, éd. Stock (2021).
Des défauts de la campagne de vaccination européenne
Depuis décembre, le discours a été changé, la procédure allégée en France. Maintenant les limites que l’on connaît sont européennes, non pas françaises. Pourquoi l’UE a-t-elle négocié aussi chichement la fourniture de doses ?
La commission a eu raison de préserver la sécurité des citoyens en négociant le plus juste prix mais il y a un déséquilibre en défaveur de l’urgence de vacciner.
La France doit intervenir au niveau de l’UE pour accélérer les choses, mais non pas contribuer à affaiblir l’union et l’organisation européenne.
La question du vaccin AstraZeneca
Le vaccin AstraZeneca est disponible, il protège presque à 100% contre les formes graves et à 80% contre les tout-venant. L’inconvénient est qu'il entraîne fréquemment chez les plus âgés des signes secondaires bénins mais marqués. C’est vrai que les vaccins ARN qui sont prodigieux, sont peu plus efficaces et plus tolérés.
Pour Sanofi il y a eu une erreur de jugement, incontestablement, et il faut être sévère. En 2019 le partenaire de BioNTech c’était Sanofi. Et s’il avait su évaluer la situation, BioNTech n'aurait pas vendu son brevet sur l’ARN à Pfizer. Il s’agit d’un incident industriel lié sans doute à une importante erreur de management.
Comment gérer l'arrivée de nouveaux variants ?
En mai 2020 je ne pensais pas qu'il serait si difficile de faire disparaître le coronavirus. Je ne pensais pas qu’il développerait des variants aussi coriaces. Il est certain que l’émergence des nouvelles souches modifie la donne.
Le scénario le plus probable est qu'on arrive à gagner une bataille importante mais toujours sous la menace d’une reprise épidémique avec l’apparition de nouvelles souches résistantes à l’immunité antérieure. Le scénario où on devra se faire vacciner tous les ans est possible.
La technologie ARN dans le traitement du cancer
L’ARN pourrait être une solution pour le cancer. D’ailleurs BioNtech et Moderna ont d’abord développé l’ARN pour le cancer. L’ARN ne va pas changer fondamentalement les conceptions que l’ont a aujourd'hui de lutte contre le cancer mais un moyen supplémentaire de lutter. Il n’y a pas de voie conceptuellement nouvelle dans la lutte contre le cancer.
Pour une vaccination obligatoire ?
Est-ce que les soignants doivent se faire vacciner ? Ma réponse, sans ambiguïté, ni hésitation, est oui pour deux raisons. D’abord ça les protège et ensuite la vaccination protège beaucoup contre la contamination, donc ils protègent aussi leur patient. Le nombre de contamination à l’hôpital a explosé. C’est un devoir moral pour eux. C’est aussi un devoir professionnel de se faire vacciner.
Mais je ne suis pas sûr qu’obliger la vaccination soit efficace. Ça ne me choquerait pas en France mais il faut prendre en compte l’état de l’opinion et je ne suis pas sût que cette obligation obtienne de meilleures résultats qu’une persuasion et une acceptation en conscience des soignants.
Le débat pour un pass sanitaire doit être mené et pour l’instant je n’y suis pas hostile. Pour que le passe sanitaire soit déployé il faut que toutes les personnes qui le souhaitent puissent être vaccinées. Ensuite il faut que les personnes qui refusent puissent le faire en connaissance de cause. Dans ces conditions là, si les choses sont parfaitement claires, le pass sanitaire doit reposer sur la responsabilité des personnes qui ont choisi de ne pas se faire vacciner.
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