Les échecs sont-ils des jalons nécessaires sur le chemin d’un succès final qui nous en rembourserait ? Après avoir célébré la figure du winner, une avalanche d'essais anglo-saxons tendent à envisager l'échec comme une épreuve positive. L’échec, sujet vendeur outre-Atlantique, un signe des temps ?
• Crédits : Adie Bush - Getty |
L’échec serait-il devenu un sujet vendeur ? Dans une série de podcasts hebdomadaires, la journaliste et romancière britannique Elizabeth Day interviewait des personnalités, en axant ces entretiens sur leurs échecs. Gros succès. Elle publie à présent une espèce de manuel de l’échec réussi, Failosophy : A Handbook For When Things Go Wrong. Intraduisible, si ce n'est par un approximatif Plantageosophie : Manuel pour quand ça tourne mal. L’an dernier, elle avait déjà publié How to Fail (Comment échouer). Voilà quelqu’un qui fait carrière sur l’échec. Signe des temps ?
Comme le remarque Megan Nolan dans le New Statesman, on a assisté, ces dernières années, à une véritable avalanche de livres consacrés au thème de l’échec. Et c’est troublant.
Le dessinateur de bandes dessinées américain Scott Adams, créateur de la fameuse série Gilbert consacrée au monde de l’entreprise, a ainsi publié en 2013 un livre intitulé How To Fail At Almost Everything and Still Win Big (Comment échouer dans presque tout et cependant gagner le gros lot). Depuis, un nombre incalculable de bouquins prétendent apprendre aux Américains à "gérer leurs échecs". Le plus souvent dans l’idée de les transformer en succès, mais pas nécessairement. Les Américains seraient-ils en train de prendre conscience de l’échec que leur propre pays est en train de subir ? Par exemple dans sa rivalité avec la Chine pour le leadership mondial ?
On dira que la culture américaine a constamment célébré le "winner". Que le milliardaire Donald Trump est probablement parvenu à se faire élire président du pays, en 2016, malgré ses frasques et son incompétence, précisément parce qu’il incarnait ce rêve américain : devenir riche et puissant, pouvoir "s’en payer". Et que son incapacité à assumer, cette année, son échec électoral, démontre combien le fait de perdre est insupportable aux Américains.
Pourtant, leur littérature, le cinéma hollywoodien ne manquent pas de très beaux portraits de "losers magnifiques" : Barry Lindon, Taxi Driver, Macadam cow-boy, Vol au-dessus d’un nid de coucou… . Et cela ne date pas des années soixante : les romans de Scott Fitzgerald sont tous consacrés à de tels personnages.
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